Fuir la solitude : bonne ou mauvaise idée ?
Ou comment reconnaitre son besoin de solitude et le valider ?
La solitude, c’est avant tout le fait d’être seul. Et si on parle du fait d’être seul, alors on doit aussi prendre en compte les relations aux autres, donc le lien social. Dans la plupart des courants en psychologie, le lien social est vu comme un besoin fondamental de l’humain. C’est le lien social qui permet de se développer. Par exemple, au début de la vie, on survit grâce aux autres qui nous nourrissent et prennent soin de nous, puis on apprend par les autres et on se construit progressivement.
C’est donc assez clair, le contact social est indispensable pour les humain. Mais qu’en est-il de la solitude ? Est-ce que c’est nécessaire, ou bien quelque chose que l’on vit par défaut ? La réponse n’est pas si simple !
1. D’un côté, la solitude peut être vue comme quelque chose de négatif : un manque de lien avec les autres, ou un choix par défaut par exemple, c’est la SOLITUDE NÉGATIVE.
2. De l’autre côté, la solitude peut être considérée comme positive, puisqu’elle permet de grandir comme humain, c’est la SOLITUDE POSITIVE.
A la question, est-ce que c’est bien ou mal d’être seul, il n’y a donc pas une seule bonne réponse ! Et puisque ces deux types de solitude existent, allons voir de plus près à quoi cela correspond.
La solitude négative
La solitude, un manque de connexion sociale
Nous l’avons dit, la solitude c’est le fait d’être seul. Ce manque de connexion sociale peut nuire au développement individuel s’il est prolongé. Un manque de contact avec les autres pourrait entraîner des conséquences sur la santé physique et psychologique : troubles du sommeil, baisse de l’estime de soi, anxiété, dépression… Par exemple, le fait d’être seul pourrait amener à ressentir plus de tristesse, à avoir l’impression de ne pas être intéressant pour les autres, ou encore à se sentir anxieux à l’idée d’interagir avec les autres. Ces conséquences de la solitude pourraient dans certains cas entrainer une augmentation de la consommation d’alcool ou d’autres comportements nuisibles pour la santé et la santé mentale.
Sous cet angle, la solitude parait bien inquiétante !
La solitude et l’évolution de l’espèce humaine
Être seul peut donc amener des conséquences négatives sur la santé physique et psychologique. Selon certains, la solitude c’est aussi un risque pour la survie de l’espèce humaine. Historiquement, rester en groupe était ce qui permettait aux humains de survivre : se protéger des animaux sauvages, coopérer pour partager les tâches quotidiennes, se reproduire… Aujourd’hui, c’est toujours le cas puisqu’un bébé naissant n’est pas capable de subvenir seul à ses besoins physiques et émotionnels. Il a besoin du contact social de ses parents ou des personnes qui prennent soin de lui pour survivre. Dans cette optique, la solitude n’est pas idéale pour l’humain, mais elle est plutôt vue comme un choix par défaut. C’est-à-dire que si autour de vous personne n’est disponible pour établir un lien, ou si vous rencontrez des difficultés qui vous empêchent d’être en lien avec les autres, alors oui vous serez seul, mais ce sera un choix par défaut : une solitude non voulue et donc négative.
L’anxiété sociale et la solitude
L’anxiété sociale, c’est la crainte incontrôlée de se confronter à des situations sociales, par peur d’être observé.e, jugé.e, ou humilié.e. Comme son nom l’indique, l’anxiété sociale se manifeste dans un contexte où plusieurs personnes sont présentes. Alors, la solitude devient la « solution idéale » pour éviter de ressentir cette anxiété ! Et les personnes qui souffrent d’anxiété sociale ont tendance à éviter les situations sociales et se retrouvent davantage seules. C’est une stratégie qui peut sembler efficace au début, mais qui finit par renforcer les craintes et augmenter le sentiment d’isolement. Même si au début, on a l’impression de s’isoler par choix, il est très probable que cela devienne ensuite une nécessité car la crainte sera devenue trop grande. C’est donc une solitude qui devient imposée, et donc négative.
Peut-être vous êtes-vous reconnu.e dans une de ces descriptions de la solitude négative. Allons regarder maintenant du côté de la solitude positive.
La solitude positive
La solitude, étape nécessaire du développement de l’individu
La présence des autres permet à chaque individu de se développer. C’est aussi le cas de la solitude, qui est vue comme une étape importante du développement de l’enfant. Avec la solitude progressive, l’enfant devient autonome et c’est cette autonomie qui lui permet de construire son identité (ses goûts, ses valeurs…). En effet, comment savoir ce que l’on aime, et qui on est, si on ne peut pas se poser la question tout.e seul.e, si les autres sont toujours présents pour nous dire ce qu’ils en pensent ? La solitude est donc positive lorsqu’elle offre un espace de réflexion sur soi-même, dès l’enfance et tout au long de la vie. En plus d’apprendre plus sur nous, on développe notre estime de nous-même et on peut s’épanouir comme individu.
La solitude et les relations sociales
En plus d’être un atout pour se construire et grandir avec soi-même, la solitude permet de mieux se positionner face aux autres : si l’on sait ce que l’on aime, et ce qui est important pour nous ; on est davantage en mesure de le communiquer aux autres, et de le faire respecter. Même si cela peut sembler paradoxal, être seul par moment favorise des relations sociales équilibrées et satisfaisantes.
La solitude, moteur de créativité
Êtes-vous plus créatif quand vous êtes seul ou quand vous êtes en groupe ? Si vous posez la question autour de vous, les réponses seront probablement différentes. Toutefois, il semblerait que la solitude permette une plus grande concentration et une imagination plus débordante. Le fait de ne pas être interrompu.e dans le processus créatif permettrait aussi de dépasser sa pensée habituelle pour aller plus loin et trouver des idées plus originales. En psychologie, on parle aussi d’un état mental spécifique, le flow. Le flow est défini comme un état de concentration et de bien-être profonds, favorisant une créativité optimale. Cet état surviendrait surtout dans des moments de solitude (vous pouvez vous référer à l’article sur le sujet pour en savoir plus sur l’état de flow).
La solitude, une question de dosage
Pour résumer, il existe donc une forme de solitude négative et une forme de solitude positive, et les deux peuvent co-exister chez chacun d’entre nous.
Mieux reconnaitre et valider sa solitude
Voici quelques questions à se poser pour mieux comprendre sa solitude :
- Est-ce que ma solitude est prolongée ou ponctuelle ?
- Est-ce que ma solitude est satisfaisante ou désagréable ?
- Est-ce que ma solitude est choisie réellement ou par défaut (manque d’entourage, anxiété sociale)
Vous remarquerez que ces questions impliquent d’avoir des moments de solitude dans la vie, sans cela on ne pourrait pas y répondre.
Pourtant, pour certaines personnes, la solitude est quasi-inexistante. Par peur de se retrouver face à soi-même, certains ont tendance à accumuler les relations et les activités sociales, sans forcément en retirer de satisfaction. Cela laisse peu de place à l’introspection et peut amener d’autres conséquences. C’est donc l’équilibre entre contact social et solitude qui est important.
Comment savoir si j’ai un bon équilibre de contacts sociaux et de solitude ?
Il n’est pas simple de répondre à cette question en une phrase. S’il est certain que le contact social est nécessaire à chacun de nous, il est aussi clair que la solitude est bénéfique.
Et puisqu’en matière de psychologie, il y a peu de règles qui fonctionnent pour tout le monde, l’équilibre est différent pour chacun. Certains seront satisfaits de peu de relations, authentiques et profondes ; tandis que d’autres préfèreront nouer davantage de liens avec plus de personnes. La question n’est plus tellement de savoir si être seul.e, c’est bien ou non en général ; mais plutôt si c’est bien ou non pour vous. Et pour répondre à cette question, rien de mieux qu’un peu de pratique.
Quelles questions se poser pour identifier le type de solitude que vous vivez ?
Voici quelques pistes de réflexion pour vous aider à vous poser les bonnes questions :
- A quelle fréquence suis-je seul.e et pendant combien de temps ?
La solitude négative a tendance à être prolongée, persistante et associée à un sentiment d’isolement et de détresse émotionnelle. A l’inverse, la solitude positive est davantage ponctuelle, bénéfique et associée à un choix.
- Lorsque je suis seul.e, comment je me sens ? Est-ce plutôt agréable ou désagréable ?
La solitude négative a des conséquences néfastes sur le bien-être mental et physique (anxiété, dépression, baisse de l’estime de soi). En revanche, la solitude positive contribue à la croissance personnelle, à l’introspection et au contact avec les émotions. Ce qui compte, c’est donc votre niveau de satisfaction avec la situation. Si cela vous convient, et que vous n’êtes pas dans un processus d’évitement (évitement de situations sociales à cause d’une anxiété sociale, ou à l’inverse évitement de la solitude par contacts sociaux excessifs), c’est que vous êtes dans une solitude positive.
- Quelle est la cause de ma solitude ? Est-elle choisie ?
La solitude négative résulte le plus souvent d’un manque de connexion sociale, causé par un manque de disponibilité dans l’environnement, des difficultés relationnelles, ou encore des insatisfactions relationnelles répétées. Tandis que la solitude positive répond à un besoin de se ressourcer, de réfléchir ou de s’engager dans des activités créatives.
- Est-ce que ma façon de vivre la solitude est liée à de l’évitement ?
Comme nous l’avons expliqué, la solitude peut être accentuée par l’évitement des situations sociales, en lien par exemple avec une anxiété sociale. A l’inverse, la solitude peut aussi être une source d’évitement, notamment lorsque le fait d’être seul génère des craintes importantes ou une détresse émotionnelle. Dans les deux cas, il s’agit de stratégies d’évitement rarement efficaces, car elles génèrent de la frustration, et sont clairement inefficaces à long terme. Plutôt que d’améliorer la situation, ces stratégies vous soulageront temporairement mais rendront l’objet de vos craintes encore plus menaçant. Si vous agissez par évitement, que ce soit en évitant les situations sociales, ou en évitant la solitude, il est important d’en avoir conscience car cela pourrait amener des conséquences négatives à long terme.
- Attention aux idées reçues
On entend souvent que les interactions sociales sont indispensables pour les humains, et que l’on ne peut pas s’en passer. Bien que le besoin d’interactions sociales soit effectivement indispensable pour tous les humains, cela ne signifie pas qu’il est le même pour tous ! Prenez le temps d’observer comment vous vous sentez quand vous êtes seul.e, mettez cela en perspective avec ce que vous venez de lire, et maintenant vous avez toutes les cartes en main pour savoir si votre solitude est bonne pour vous ou non.
N’oubliez pas que la réponse peut varier au fil du temps, vous pourriez être satisfait de la solitude pendant un moment, puis ne plus l’être ensuite, c’est normal ! L’important, c’est d’avoir conscience de l’évolution de ce besoin, pour y répondre de la meilleure façon.
Bon à savoir :
Vous pourriez vivre de la solitude négative si :
- Vous percevez une différence entre vos besoins de contacts sociaux et vos interactions sociales réellement vécues.
- Vous vous sentez détaché.e, isolé.e émotionnellement, insatisfait.e dans vos interactions sociales.
- Vous cherchez à éviter les situations sociales car vous vivez des craintes d’être observé.e, humilié.e, jugé.e lorsque vous êtes en présence d’autres personnes.
Vous pourriez vivre de la solitude positive si :
- Les moments de solitude vous permettent de trouver un équilibre entre les interactions sociales et vos besoins individuels.
- Vous vivez les moments de solitude comme une opportunité pour réfléchir sur vous-mêmes, votre identité, ce qui est important pour vous, ou pour développer votre créativité.
- Le temps que vous passez seul.e est satisfaisant et agréable.
Que vous préfériez être seul.e ou à plusieurs, la solitude a au moins autant de bénéfices que le fait d’être en groupe, alors pensez à prendre du temps de qualité avec vous-même !